Biographies et autobiographies

Monsieur Aznavour : ses amis, ses amours, ses emmerdes… en un biopic de grand cinéma

Ce biopic, j’attends sa sortie depuis au moins un an, mais je me rends compte que je ne connais pas si bien que cela ni la vie ni l’œuvre de Charles Aznavour.

J’aime les chansons d’Aznavour en souvenir de ma grand-mère Annette qui l’écoutait énormément comme tous les chanteurs à textes de sa génération. Elle avait vingt ans dans les années 1950 et elle allait écouter les chanteurs à la mode à Deauville-Trouville pendant ses vacances.

Je suis allée voir Charles Aznavour en concert avec ma mère qui fêtait ses 50 ans en 2011 à la halle Tony-Garnier à Lyon. Il avait à l’époque 80 ans bien tassés, mais il a réalisé un concert énergique qui a duré bien trois heures. Avec le film, je me rends compte que c’était vraiment un addict au travail dans la décennie 2010 (il est mort en 2018) puisqu’il donnait des concerts dans toutes les villes d’Europe.

Le résumé :

Fils de réfugiés, petit, pauvre, à la voix voilée, on disait de lui qu’il n’avait rien pour réussir. À force de travail, de persévérance et d’une volonté hors norme, Charles Aznavour est devenu un monument de la chanson, et un symbole de la culture française.

Monsieur Aznavour, biopic réalisé par Grand corps malade et Medhi Idir, avec Tahar RahimBastien BouillonMarie-Julie Baup, 2h13, sortie en salles le 23 octobre 2024

Mon avis :

Ce biopic dure deux heures et quart mais je l’ai trouvé très bien structuré avec une narration en cinq grandes parties. Chaque titre est noté au crayon dans ses fameux carnets rouges où il notait ses chansons. Aznavour a composé plus de 1400 chansons depuis 1940.

Ses années d’enfance avec sa sœur Aïda et ses parents restaurateurs m’ont beaucoup émue. Notamment ces scènes de fête qui se télescopent avec des images d’archives du génocide arménien. Ils ont vécu la pauvreté, le racisme mais ils sont restés sacrément unis. Le couple qui joue les parents de l’artiste sont très touchants.

Copyright Tukimuri

Ils n’ont pas hésité à cacher le couple Manouchian pendant la guerre dans leur appartement du 6eme arrondissement avec l’issue tragique que l’on connait. La scène de liesse à la Libération est un moment fort du film avec ses drapeaux bleu-blanc-rouge même si on voit de loin que les immeubles parisiens sont des décors de studio.

Son amitié avec Pierre Roche, un pianiste issu de la bourgeoisie va lui permettre de rencontrer Edith Piaf, qui se montrera autant de bons conseils que de mauvaise foi un peu méchante et acide. Piaf est superbement jouée par Marie-Julie Baup qui apporte une toute autre interprétation que Marion Cotillard. Plus tôt en octobre, j’avais lu la biographie très authentique de Piaf par sa sœur de rue Simone Berteaut. Charles Aznavour a vraiment été bien fait de lui servir d’homme à tout faire pendant huit ans. La scène où il s’émancipe de Piaf est fascinante.

La France s’est aznavourée dans les années 1960 après lui avoir ri au nez pendant vingt ans

Ce biopic montre sa tenacité face aux salles à moitié vides, aux critiques déplacées sur sa taille, son physique, ses origines. Puis un soir en 1960, il a écrit une chanson géniale Je me voyais déja et sa carrière a enfin décollé à 36 ans.

Aznavour inspire les jeunes générations notamment le rap et le slam. Dr Dre a samplé Parce que tu crois écrit en 1966 et c’est magnifiquement rendu dans le film pour illustrer les années de vaches grasses d’Aznavour après les nombreuses années de vaches maigres.

La série Lupin de Netflix se termine avec un morceau d’Aznavour pour illustrer des retrouvailles familiales : Hier encore.

J’ai découvert qu’une chanson que j’aime tout particulièrement She reprise dans un de mes films favoris Coup de foudre à Nothing Hill a été composé par Charles Aznavour alors que je pensais que c’était un crooner américain. A l’apogée de sa carrière Aznavour est parvenu à obtenir le même cachet que Sinatra.

Et enfin, la plus belle transmission de l’oeuvre d’Aznavour, c’était ce petit moment suspendu cet été où j’ai entendu des fillettes africaines dans mon quartier qui chantaient For me, formidable après la prestation d’ Aya Nakamura avec la garde républicaine lors de la cérémonie d’inauguration des Jeux olympiques de Paris 2024.

Pour moi la magie du cinéma , c’est de donner au spectateur une émotion unique, intemporelle et universelle quand il découvre le processus de création : la genèse d’une chanson mondialement connue. Une chanson est réussie quand elle rappelle des souvenirs, des émotions au monde entier. Le cas du Boléro de Ravel.

Les biopics qui m’ont le plus émue :

Ray, avec Jamie Foxx, 2005

Encore un chanteur dont la musique m’a été transmise par ma grand-mère. Je crois qu’elle l’a vu en concert une fois au casino du Touquet. Il est né en 1930 comme mon grand-père. J’ai beaucoup aimé ce biopic qui raconte l’ascension d’un jazzman aveugle dans un pays sacrément raciste. Ce biopic parle de ses addictions, de ses drames enfant et aussi de la manière dont son Etat d’origine : la Géorgie a fait amende honorable avec lui. On a tous le superbe chant Georgia on my mind en tête.

Walk the line avec Joaquin Phenix, Reese Witherspoon, 2006

J’ai découvert ce biopic par hasard car je connaissais Johnny Cash et June Carter Cash que par leurs rôles dans les séries Docteur Quinn femme médecin et La petite maison dans la prairie. J’aime beaucoup la musique country et cette belle histoire d’amour avec une chanteuse country m’a beaucoup fait rêver. Comme Ray Charles, Johnny Cash a vécu une enfance difficile et précaire avec un accident dramatique qui a tué son frère. Longtemps, Johnny a été dépendant à la drogue pour exorciser son passé puis il a découvert la foi en Jésus qui sauve et restaure…

La môme avec Marion Cotillard, Sylvie Testud, 2007

Edith Piaf est une légende française par son histoire personnelle et sa voix qui a bouleversé le monde entier comme l’indique sa plaque de lieu de naissance rue de Belleville. J’ai vécu pendant cinq ans dans son quartier d’origine.

On pourrait la qualifier aujourd’hui de personne toxique mais elle reste tout de même assez attachante pour la manière dont elle vivait ses chansons. Elle ne trichait pas et elle a su faire aimer son Paris populaire dans le monde entier : Etats-Unis en tête.

Cloclo avec Jérémie Rénier et Benoit Magimel en 2012,

Ce biopic je l’ai vu avec mon frère, grand fan des chansons de Claude François. Avec ce film on a réalisé que l’homme était vraiment imbuvable et zinzin. Mais c’est un très beau film qui commence par un exil forcé, le revers de fortune du papa en Egypte.

La famille sera obligée de revenir en France sans rien. La performance de danseur et de chanteur de l’acteur est exceptionnelle, elle aurait mérité un César.

Boléro avec Raphaël Personnaz, 2024

C’est plutôt l’histoire du Boléro qui est intéressante ici que celle de Maurice Ravel. C’est l’un des morceaux de musique classique le plus écouté au monde. Sa lente élaboration tout au long du film m’a passionnée.

J’ai vraiment hâte de voir les deux biopics consacrés à Johnny Hallyday . D’ailleurs, Johnny fait une courte apparition dans le film Monsieur Aznavour.

Et vous quelle est votre chanson favorite de Charles Aznavour?

Retrouvez ici mes précédents articles de la rubrique Toute la musique que j’aime et autres hommages :

Le loup, la biche et le chevalier d’Henri Salvador dans la playlist de ma fille

-Hommage à Jane Birkin, la meilleure ambassadrice de la poésie de Gainsbourg

-La Bébel mania, la nostalgie d’une France où tout allait bien

BD & romans graphiques·Biographies et autobiographies

Missak et Mélinée Manouchian, reconnus par la Nation française pour leur résistance face à la haine.

Missak Manouchian est le résistant dont je connais le mieux l’histoire car je viens de Valence dans la Drôme, où vit depuis 1919 une importante communauté arménienne. J’ai étudié en cours d’histoire-géo en terminale, sa fameuse lettre d’adieu écrite à sa femme Mélinée avant d’être exécuté au mont Valérien avec son groupe de résistants, il y a quatre-vingt ans.

Je suis vraiment ravie de son entrée ainsi que celle de sa femme au Panthéon que je trouve très symbolique, c’est une vraie reconnaissance pour l’amitié franco-arménienne. Il se trouve que je vais pouvoir voir un petit bout de la cérémonie mercredi car je travaille juste à coté.

J’avais beaucoup aimé l’ambiance dans les rues pour l’entrée au Panthéon de Joséphine Baker en novembre 2021. Les résistants ne sont pas oubliés par la Nation, même quatre-vingt ans après la fin de la seconde guerre mondiale.

J’ai découvert cette BD grâce au journal municipal de ma ville : Fontenay sous bois, une ville historiquement communiste. Je remercie beaucoup les éditions des Arènes pour l’envoi de cette BD en service de presse.

Missak Manouchian, une vie héroïque de Didier Daeninckx et Mako, éditions Les Arenes,120 pages, 22€

Ecrite par Didier Daeninckx et illustrée par Mako, cette BD a été coéditée par le ministère des armées, un éditeur de livres un peu atypique souvent présent au festival du livre de Paris.

Le graphisme de ce roman graphique est très réussi. Le dessinateur Mako est parvenu à saisir toute la gravité du personnage principal mais aussi la laideur de l’époque, défigurée par la haine et la délation à tout moment.

J’ai énormément apprécié la structure de cette bande dessinée avec le recours aux grandes affiches de cinéma de l’époque pour faire une pause visuelle dans le déroulé de l’histoire.

Beaucoup de BD et de livres ont été écrits sur le groupe Manouchian ces dernières années mais j’ai aimé que cette BD reflète la société avec cette propagande omniprésente dans les rues. L’affiche était alors une véritable arme de guerre dans les rues.

La visée de cette BD est bien entendu d’être un support pédagogique pour les publics scolaires et dans les musées.

L’équipe qui a conçu cette BD va faire une tournée des musées avec une série de conférences au musée de la Libération, place Denfert Rochereau à Paris ( le mercredi 13 mars) ou bien au centre du patrimoine arménien à Valence entre janvier et mars 2024.

En 2019, j’avais chroniqué une BD historique formidable: Guernica de Bruno et Corentin Loth, éditions La boite à bulles. Toute ma scolarité, j’ai beaucoup aimé les cours d’histoire-géographie. Ils m’ont permis de sauver les meubles sur bon nombre de bulletins scolaires car c’était ma passion.

Mais le vrai passionné de la seconde guerre mondiale, c’était mon frère Ugo qui a gagné de nombreuses fois un prix du concours national de la Résistance et de la déportation. Il a visité tous les sites majeurs : Ouradour sur Glane, un camp de concentration en Alsace, les plages du Débarquement…

Moi, je suis plus sensible aux romans graphiques, aux oeuvres de street art vues par tous et les plaques qui nomment les rues (le nom de ma rue est celui d’une grande résistante française) pour entretenir le devoir de mémoire. J’aime aussi énormément les pochoirs de C215 et son engagement pour les prisonniers, les résistants, l’Ukraine…

Retrouvez ici les précédents articles que j’ai écrit sur les biographies marquantes de la Seconde guerre mondiale.

Une vie heureuse de Ginette Kolinka, ne pas laisser la déportation noircir toute une vie.

Aux grands hommes et femmes, la Patrie reconnaissante

La fresque de street art à Belleville pour célébrer l’entrée au Panthéon des résistantes Germaine Tillion et Genevieve Anthonioz-De Gaulle.