BD & romans graphiques·Biographies et autobiographies

Missak et Mélinée Manouchian, reconnus par la Nation française pour leur résistance face à la haine.

Missak Manouchian est le résistant dont je connais le mieux l’histoire car je viens de Valence dans la Drôme, où vit depuis 1919 une importante communauté arménienne. J’ai étudié en cours d’histoire-géo en terminale, sa fameuse lettre d’adieu écrite à sa femme Mélinée avant d’être exécuté au mont Valérien avec son groupe de résistants, il y a quatre-vingt ans.

Je suis vraiment ravie de son entrée ainsi que celle de sa femme au Panthéon que je trouve très symbolique, c’est une vraie reconnaissance pour l’amitié franco-arménienne. Il se trouve que je vais pouvoir voir un petit bout de la cérémonie mercredi car je travaille juste à coté.

J’avais beaucoup aimé l’ambiance dans les rues pour l’entrée au Panthéon de Joséphine Baker en novembre 2021. Les résistants ne sont pas oubliés par la Nation, même quatre-vingt ans après la fin de la seconde guerre mondiale.

J’ai découvert cette BD grâce au journal municipal de ma ville : Fontenay sous bois, une ville historiquement communiste. Je remercie beaucoup les éditions des Arènes pour l’envoi de cette BD en service de presse.

Missak Manouchian, une vie héroïque de Didier Daeninckx et Mako, éditions Les Arenes,120 pages, 22€

Ecrite par Didier Daeninckx et illustrée par Mako, cette BD a été coéditée par le ministère des armées, un éditeur de livres un peu atypique souvent présent au festival du livre de Paris.

Le graphisme de ce roman graphique est très réussi. Le dessinateur Mako est parvenu à saisir toute la gravité du personnage principal mais aussi la laideur de l’époque, défigurée par la haine et la délation à tout moment.

J’ai énormément apprécié la structure de cette bande dessinée avec le recours aux grandes affiches de cinéma de l’époque pour faire une pause visuelle dans le déroulé de l’histoire.

Beaucoup de BD et de livres ont été écrits sur le groupe Manouchian ces dernières années mais j’ai aimé que cette BD reflète la société avec cette propagande omniprésente dans les rues. L’affiche était alors une véritable arme de guerre dans les rues.

La visée de cette BD est bien entendu d’être un support pédagogique pour les publics scolaires et dans les musées.

L’équipe qui a conçu cette BD va faire une tournée des musées avec une série de conférences au musée de la Libération, place Denfert Rochereau à Paris ( le mercredi 13 mars) ou bien au centre du patrimoine arménien à Valence entre janvier et mars 2024.

En 2019, j’avais chroniqué une BD historique formidable: Guernica de Bruno et Corentin Loth, éditions La boite à bulles. Toute ma scolarité, j’ai beaucoup aimé les cours d’histoire-géographie. Ils m’ont permis de sauver les meubles sur bon nombre de bulletins scolaires car c’était ma passion.

Mais le vrai passionné de la seconde guerre mondiale, c’était mon frère Ugo qui a gagné de nombreuses fois un prix du concours national de la Résistance et de la déportation. Il a visité tous les sites majeurs : Ouradour sur Glane, un camp de concentration en Alsace, les plages du Débarquement…

Moi, je suis plus sensible aux romans graphiques, aux oeuvres de street art vues par tous et les plaques qui nomment les rues (le nom de ma rue est celui d’une grande résistante française) pour entretenir le devoir de mémoire. J’aime aussi énormément les pochoirs de C215 et son engagement pour les prisonniers, les résistants, l’Ukraine…

Retrouvez ici les précédents articles que j’ai écrit sur les biographies marquantes de la Seconde guerre mondiale.

Une vie heureuse de Ginette Kolinka, ne pas laisser la déportation noircir toute une vie.

Aux grands hommes et femmes, la Patrie reconnaissante

La fresque de street art à Belleville pour célébrer l’entrée au Panthéon des résistantes Germaine Tillion et Genevieve Anthonioz-De Gaulle.

Biographies et autobiographies

Pagny raconté par Florent, quarante ans de carrière raconté en 500 pages

Je viens de terminer une belle autobiographie de 500 pages écrite par Florent Pagny avec son acolyte Emmanuelle Cosso qui lui a écrit de nombreuses chansons. Cela s’appelle Pagny par Florent aux éditions Fayard.

J’ai réalisé récemment à quel point Zazie, Pascal Obispo et Florent Pagny avaient marqué mon enfance dans les années 1990. Je ne suis pas allée écouter Johnny au stade de France chanter Allumez le feu. Mais je me souviens que les chansons Lucie ou Savoir aimer étaient les hits gagnants de nos boums de CM2 à l‘école Léo Lagrange à Valence.

J’ai lu en diagonale les deux premières pages de ce gros pavé. J’en retiens que comme Pascal Obispo qui le raconte très bien dans l’émission Un dimanche à la campagne sur France 2, Florent Pagny a connu une longue période de vaches maigres dans les années 1980. Il a percé avec une belle chanson N’importe quoi qui dénonce les ravages de la drogue, qui a détruit les trajectoires de quelqu’uns de ses copains.

Lire un extrait du livre ic

J’ai beaucoup aimé lire son histoire car je ne savais pas qu’il avait été un acteur de cinéma de premier plan. C’était bien agréable d’avoir son ressenti sur son histoire d’amour avec Vanessa Paradis plutôt que les racontars de Gala ou Voici.

Florent Pagny a longtemps été un chanteur sans chansons, il a pris une très belle revanche dans les années 1990. Il raconte ses amitiés avec Pascal Obispo, Johnny, Zazie, Calogero qui lui a écrit une chanson marquante : Chatelet les Halles. Vu le peu de poésie de cet endroit sans âme où je passe tous les matins, il fallait le faire, chapeau l’artiste.

Mes chansons préférées de Florent Pagny sont bien évidemment Savoir aimer, Bienvenue chez moi, Si tu veux m’essayer, Et un jour une femme

C’est un grand romantique qui s’est inspiré dans sa musique de son mariage avec sa femme argentine Azucena. Ils sont mariés depuis plus de 25 ans et elle est son pilier face à ce cancer redoutable auquel il est confronté depuis ses soixante ans. C’est beau de voir le public prendre de ses nouvelles de cette manière, quand on grandit avec un chanteur, il devient un peu comme un membre de la famille.

La lecture de cette autobiographie a été un bon moment, une sorte de machine à remonter le temps dans les années 1990. J’aime beaucoup cette manière de raconter la genèse d’une chanson iconique comme Savoir aimer. Florent Pagny se sert aussi de son autobiographie pour se justifier par rapport à ses soucis avec le fisc.

Il ne m’a pas toujours convaincue mais j’ai bien aimé le ton de son livre entre humour potache et autodérision. C’est assurément une personne sympathique qui sait d’où il vient et qui montre de la reconnaissance à ceux qui l’ont fait débuté dans le métier.

Aussi, Florent Pagny est de longue date un des membres du jury du concours à l’aveugle The voice. C’est une émission de qualité qui permet de faire des ponts entre chanteurs de différentes générations. J’aime bien retrouver les talents de The voice qui font une surprise à leur coach en interprétant un medley de ses chansons.

Je profite de cet article pour vous annoncer la création d’une nouvelle rubrique dans ce blog : Toute la musique que j’aime, une page dédiée à mes coups de coeur de la chanson française : Stromae, Jane Birkin, Andrée Grise

Je vais bientôt aller voir l’exposition patrimoniale consacrée à Johnny Hallyday, porte de Versailles.

Biographies et autobiographies·Littérature

Pourquoi Dix-neuf marches est un roman young adult efficace qui raconte le Blitz aux jeunes générations.

J’ai découvert ce roman sur le compte Instagram de son éditeur Robert Laffont. En 2023, j’avais eu la chance de chroniquer L’âge bête de Géraldine Dormoy et Une reine de Judith Elmaleh, grâce à leurs envois en services de presse. J’en profite pour remercier chaleureusement l’éditeur pour ce nouvel envoi.

Une reine et Dix-neuf marches ont un point commun : deux auteures qui racontent les conditions de vie difficiles de leurs grands-mères. Mimi, la grand-mère de Judith Elmaleh a été la seconde épouse d’un homme beaucoup plus âgé pour lui donner des enfants dans le mellah de Casablanca dans les années 1930. La grand-mère de Milly Bobby Brown, Ruth, a vécu les bombardements incessants dans son quartier populaire de l’East End à Londres.

Moi, j’ai voulu lire ce roman historique car il m’a fait penser à ma famille maternelle du Pas de Calais notamment à Julienne, mon arrière-tante et à Annette, ma grand-mère qui ont dû fuir leur maison pendant lexode pour se réfugier en Touraine en juin 1940. Ma grand-mère avait trois ans et sa tante était enceinte de son premier enfant.

Mon avis sur ce roman historique :

La beauté de cette couverture de roman est époustouflante : cette vue brumeuse du parlement et de Big ben survolée par deux avions militaires est sacrément efficace. On se plonge tout de suite dans l’atmosphère de ce roman. Il me rappelle un tableau de Monet qui a peint de nombreuses fois le Parlement anglais.

C’est l’histoire d’une famille issue d’un quartier populaire qui tente de vivre normalement malgré les sirènes incessantes qui les obligent à se ruer dans la station de métro la plus proche, transformée en abri anti-bombardements. Nellie, la jeune fille de la famille est secrétaire de mairie et essaie de vivre sa jeunesse malgré la guerre. Elle va rencontrer l’amour de sa vie, Ray, un aviateur américain qui doit prendre des risques incroyables pour gagner la guerre et libérer l’ Angleterre.

Le style littéraire de ce roman est assez sommaire, il creuse peu les émotions et les aspirations intimes de chacun . Pour résumer, la psychologie des personnages est peu développée. Dix-neuf marches est clairement un roman young adult pour ceux qui suivent de près Milly Bobby Brown.

Cependant, j’ai beaucoup aimé cette manière de raconter aux jeunes du 21eme siècle, le quotidien d’une jeune fille de leur âge dans les années 1940. Cela m’a beaucoup fait pensé à une scène de la saison 6 de The Crown. Les jeunes princesses Elisabeth et Margaret décident de filer en douce de Buckingham palace pour aller fêter la victoire et la Libération avec des soldats américains au sous-sol du palace Ritz.

Ce roman raconte un fait historique particulièrement tragique : 173 morts dans une énorme bousculade pour rejoindre en toute hâte un abri anti-bombardement dans un quartier populaire de Londres.

Cela m’a fait pensé à ma série favorite Call the midwife qui raconte les mémoires d’une sage-femme confrontée aux réalités sociales d’un autres quartiers de l’East End. Comme quoi, on les décrit beaucoup mais les cockneys sont des personnages de romans captivants.

Retrouvez-ici mes coups de coeur pour la culture anglaise. Hugh Grant a cité en ambassadeurs David Beckham, Harry Potter, Shakespeare et Sean Connery dans son mythique discours de Premier ministre dans le film Love Actually.

Je vous invite à découvrir ma passion pour la culture anglaise dans ce blog, j’écris des articles en attendant patiemment que mon mari m’organise un week-end à Londres ou à Brighton

-La piscine de Rosemary, un roman qui rend hommage à une piscine municipale mythique

-La dernière conquête du major Pettigrew, un roman aussi dépaysant qu’un voyage en Eurostar

-Au bout de quatre saisons de The Crown, on a bien fait connaissance avec la reine Elisabeth II

Biographies et autobiographies·Cinéma

Reprendre le gouvernement de sa vie : Bernadette, mon icône féministe !

Pour finir en beauté ce beau week-end d’automne, je suis allée voir la biographie Bernadette de Léa Domenach avec l’incontournable Catherine Deneuve, Michel Vuillermoz, Sara Giraudeau, Denis Podalydès…

J’avais un peu peur que toutes les bonnes idées du film soient concentrées dans la bande annonce et que le film retombe comme le brushing de Bernadette au bout de quinze minutes. Mais non, on passe un excellent moment pendant 1h32 à revivre les deux mandats de Jacques Chirac.

Quand il a été élu en 1995, j’avais huit ans et je ne connaissais rien du tout à la politique. Dans la cour de récréation, mes copines me demandaient pour qui on votait à la maison. Moi comme j’étais en admiration béate devant mon grand-père qui était un fervent gaulliste, j’ai répété bêtement Chirac. J’ai vite compris en primaire qu’être de droite c’était mal vu et ma popularité à l’école est un peu revenue quand j’ai rassuré mes copines en leur disant que ma mère votait aussi pour Lionel Jospin.

Qu’importe qu’on soit de gauche ou de droite, cette Bernadette incarnée par Catherine Deneuve rassemble tout le monde autour de la nostalgie de la décennie 1990-2000. Quel plaisir de se souvenir des 2Be3, des Musclés et de leur Merguez party, des téléphones portables gros comme des cabines téléphoniques…

Droits réservés Bernadette

Le véritable couple de cette comédie ce n’est pas Chirac et sa femme mais véritablement Bernadette et son conseil en communication, Bernard Niquet (de manière platonique cependant). C’est beau de voir la revanche de ces deux loosers que l’on a relégué dans un bureau placard dans les greniers de l’Elysée. Denis Podalydès joue tellement bien dans ce film.

Copyright Warner Bros. France

On rit beaucoup dans ce film mais il y a des moments qui sont franchement gênants et où Bernadette suscite vraiment compassion et admiration pour toutes les couleuvres que son mari et sa fille lui ont fait avaler.

Bernadette Chirac et Catherine Deneuve sont les deux grandes gagnantes de cette comédie populaire : elles ont 80 ans bien tassées et pourtant elles crèvent l’écran par leur répartie. Je vous recommande cet excellent moment de cinéma !

Retrouvez-ici mes précédents articles de blog :

-Les aventures (rocambolesques) de Margot en Guyane

-Carnet de voyages à Lille, la perle des Hauts de France

-Hommage à Belmondo et cette France quand tout allait bien.

Biographies et autobiographies

Une vie heureuse, ne pas laisser la déportation noircir toute une vie.

J’ai découvert le témoignage de Ginette Kolinka grâce à la télévision à chaque sortie de l’un de ses livres : Retour à Birkenau et Une vie heureuse, écrits avec Marion Ruggieri, publiés par Grasset. Son fils unique est Richard Kolinka, le batteur du groupe mythique Téléphone.

J’ai dû mal à lire les récits de déportés car ces lectures me donne des cauchemars. Ca me débecte quand l’Homme fait des crasses abominables aux autres. Voici une longue interview menée par Laurent Ruquier lors de la sortie du livre Retour à Birkenau.

Je trouve ça formidable que les youtubeurs comme Guillaume Pley, Jeremstar ou Hugo décrypte interviewent également des anciens déportés.

Je remercie les éditions Grasset pour l’envoi de ce livre en service de presse.

La plupart sont nonagénaires et ils n’ont pas tous la vitalité de Ginette Kolinka à traverser la France entière pour aller témoigner dans les classes de primaire ou dans les collèges- lycées.

Pour préparer cet article, je passe toute ma semaine à visionner ses interviews. J’y réfléchis quand je marche dans la rue et que je tombe sur une plaque commémorative dorée dans ma ville : Fontenay sous bois

Droits réservés Gunter Demnig

Ginette Kolinka a écrit ses deux autobiographies avec Marion Ruggieri, journaliste à Elle et chroniqueuse du magazine C’est à vous sur France 5. Il émane une belle complicité entre les deux femmes.

Elles sont venues sur le plateau de l’émission avec Richard Kolinka, son fils. J’ai trouvé cela fort intéressant d’avoir le regard d’un enfant de déporté car c’est un lourd contexte familial pour un enfant.

Ce livre regorge de flash-backs incessants entre différentes périodes de la vie de Ginette. Mais son récit est parfaitement fluide, elle nous guide à travers les années sans encombres.

Cette autobiographie, c’est le portrait d’une famille française du 20eme siècle. Le père de Ginette a combattu pendant la première guerre mondiale. Il fabriquait des imperméables dans son atelier, rue Jean-Pierre Timbaud dans le 11eme arrondissement. Leur famille tenait depuis des décennies un stand de bonneterie sur un trottoir de la Villette.

Ginette raconte que c’est l’amour de son travail qui l’a sauvée ainsi que l’insouciance qu’elle a retrouvé dans les fêtes au Balajo avec son futur mari. J’aime beaucoup la reproduction de sa photo de mariage en noir et blanc dans le livre. Elle est rayonnante aux côtés de son mari. C’est une belle revanche sur ses années de déportation d’où elle est revenue la peau sur les os (elle pesait 26 kilos).

Au lieu de me galérer à résumer ce livre, je laisse la parole à Olivia de Lamberterie, que je considère comme l’une des critiques littéraires les plus douées. C’est la meilleure ambassadrice des libraires !

Retour à Birkenau et Une vie heureuse sont des textes courts mais intenses, avec des mots bien choisis. Ils ne transpirent aucune haine, ni aigreur. Ginette Kolinka transmet à ses lecteurs sa joie de vivre, un très beau pied de nez à une dictature haineuse qui a tenté de la décimer quand elle avait dix-neuf ans.

Elle raconte en toute sincérité les mécanismes de protection qu’elle a mis en place inconsciemment pour survivre psychologiquement et physiquement dans les camps de la mort. Elle était habituée à travailler dur sur les marchés dans sa jeunesse et a mis son cerveau en pilote automatique pour ne pas laisser ses émotions et ses sentiments la submerger.

Cela m’a beaucoup marquée qu’elle préférait être seule dans le camp. Elle a réalisé que c’était une double peine terrible de partager la déportation avec une mère ou une sœur.

Ce n’est pas simple de voir sa maman complètement nue surtout dans les années 1940 où l’on était d’une grande pudeur, de s’inquiéter sans cesse qu’elle tombe malade ou d’avoir du mal à partager son pain quand on a tellement faim.

Elle raconte aussi ses camarades de détention : Simone Veil, Marcelline Loridan-Ivans avec qui elle pose en photo lors de nombreuses commémorations. A leur retour des camps, rien n’était prévu pour soutenir psychologiquement les rescapés des camps. Ginette est rentrée toute seule chez elle après avoir attendu des jours et des jours à l’hôtel Lutétia d’inutiles vérifications d’identité.

Le moment où elle retrouve sa maman et ses sœurs qui n’ont pas été déportées, est terrible. Elle a vu tant de morts dans les camps qu’elle ne prends aucune précaution pour leur apprendre que le père de famille et le petit frère ont été gazés dès leur arrivée à Birkenau.

La meilleure des thérapies pour elle fut de retrouver ses cinq sœurs qui avaient la vingtaine et qui aimaient sortir par instinct de vie pour oublier la guerre et ne pas saboter leur jeunesse.

Je dédie cet article à ma grand-mère Annette et Ma Tante Julienne. Elles sont nées en 1920 et en 1937 dans le Pas de Calais. Elles n’ont pas été déportées mais elles ont vécu la faim, les bombardements incessants dans une zone à risque, l’exode sur les routes de France. Et aussi, un petit clin d’œil à ma copine Alix qui fait un travail remarquable de médiation culturelle auprès des scolaires.

Elles m’ont transmis l’amour de la vie, rire et profiter de tout ce que nous pouvons vivre de beau ! Le plus beau cadeau qu’on puisse faire à un enfant pour l’aider à se construire.

J’ai aimé ce livre car cette arrière grand-mère donne de la force à toute sa famille. Son appartement est une boite à trésors, on s’y ressource en 2023 pour affronter une société actuelle brutale, clivante.

Les personnes lumineuses comme Ginette Kolinka sont les repères d’une humanité bien inspirée.

Retrouvez-ici mes meilleurs articles consacrés à l’Histoire et aux autobiographies :

-Les Parisiens durant l’Exode, une expo du musée de la Libération

-Une reine, être une femme dans le mellah de Casablanca dans les années 1930

Biographies et autobiographies

L’âge bête, l’hyperréalisme pour raconter l’adolescence dans les années 1990

J’ai découvert Géraldine Dormoy par le biais des blogs et d’Instagram. Son analyse de la mode et du monde qui l’entoure m’intéressent beaucoup. D’autant plus qu’elle a quitté Paris pour Montélimar il y a peu de temps. Moi j’ai fait le chemin contraire : je viens de la Drôme et j’ai adopté Paris depuis quinze ans.

Puissance d’Instagram : quand on suit le compte de quelqu’un, on fait connaissance et on s’attache… C’est le moyen idéal pour annoncer à sa communauté la sortie d’un livre : L’âge bête édité par Robert Laffont, 20€.

Il ne faut jamais négliger le sous-titre : Pontoise, 1990. J’ai quatorze ans et deux ou trois incertitudes. C’est aussi lui qui déclenche l’acte d’achat. Je remercie les éditions Robert Laffont de m’avoir envoyé un service de presse pour chroniquer ce livre. J’avais également chroniqué un autre récit Une reine de Judith Elmaleh du même éditeur début décembre.

Je lis régulièrement ses post Instagram et ses newsletters pour sa plume de journaliste très précise. Elle a fait de sa passion pour la mode une expertise qu’elle souhaite partager au plus grand nombre. C’est grâce à elle que j’ai réellement compris ce qu’était la fast fashion. J’ai d’ailleurs écrit un article à ce sujet : Ce que j’ai appris de la mode grâce à Promod, Camaïeu et Bonobo

J’ai réalisé avec cette autobiographie dans laquelle je me suis un peu reconnue, que l’adolescence est un moment charnière pour se construire personnellement à travers les vêtements.

Hommage à Camaïeu et ses bombers stylés…

Il y a plusieurs thématiques fortes dans son livre et j’en ai aimé plusieurs : les relations sociales avec les autres, la construction personnelle d’une adolescente qui a eu rapidement conscience des classes sociales en voulant porter tel ou tel vêtement, pratiquer une activité extra-scolaire pour rejoindre un groupe…

Et puis roman sur l’adolescence oblige, Géraldine parle de l’intime, de la transformation de son corps et de ses sens… Même s’ils sont bien écrits, je ne me suis pas régalée à lire ces chapitres car j’estime qu’il faut préserver son intimité dans une société tellement exhibitionniste aujourd’hui…

Après, sa démarche d’écriture était honnête et authentique mais comme elle explique qu’elle fait lire au fur et à mesure de l’écriture ses chapitres à son mari, ses parents ou sa sœur pour échanger, il peut y avoir malaise…

Cela m’a évoqué le sketch de De Caunes et Garcia à cette époque qui parodiaient les animateurs de Fun Radio : Doc et Difool...J’ai trouvé que la manière dont elle racontait la construction de ses goûts, de ses passions qui lui apporteront une forme d’expertise dans son métier… beaucoup plus intéressantes que son éveil au sexe, maintes fois raconté en littérature.

Elle questionne l’éducation post 1968 transmise par ses parents concernant la pudeur et la nudité. On est très loin de La familia grande de Camille Kouchner car ses parents étaient bien moins égocentrés que ceux de l’ élite germanopratine qui n’auraient jamais dû devenir parents (voila c’est dit).

La lecture de cette autobiographie m’a fait penser à Pierre Bourdieu, à Annie Ernaux, prix Nobel de littérature. J’ai trouvé tellement attendrissant sa manière de raconter le couple de ses parents, leurs origines sociales, sa grand-tante concierge espagnole dans le 16eme arrondissement.

Ces chapitres où elle raconte ses vacances en Espagne, maintenues chaque année malgré le revers de fortune de ses parents m’a beaucoup plu. Surtout le chapitre où elle raconte qu’elle devient une petite vendeuse du dimanche dans la boulangerie du coin pour se financer elle même son argent de poche.

J’ai voulu lire ce roman car il raconte une époque : les années 1980-1990, décennie dans laquelle je suis née. Je suis une fan inconditionnelle des deux films générationnels : La Boum de Claude Pinoteau avec Sophie Marceau et j’ai adoré lire L’odeur de la colle en pot d’Adèle Bréau.

J’aime beaucoup ces romans qui racontent la vie quotidienne dans les familles françaises, qu’on vive à Paris ou en province.

J’ai reconnu des copines dans cette ado qui collectionne des miniatures de parfums pour les exposer dans un cadre en bois en forme de maison au dessus de son bureau.

Il y a quelques jours, je regardais Un dimanche à la campagne, l’émission de télévision géniale de Frédéric Lopez avec Nelson Montfort, Berengère Krief et Slimane. Berengère montrait un magazine Starclub avec les paroles des chansons populaires au dos du livre. Cela m’a rappelé mes souvenirs : Les parfums Eau jeune et Anaïs Anaïs, la Macarena, la victoire de France 98…

La force de ce livre vient également de sa couverture très réussie avec des illustrations dessinées par Isabelle Oziol de Pigniol. On y retrouve toute la saveur des années 1990 : les Bensimon, le walkman, la bouteille de parfum Trésor, les revues de mode…

C’est aussi ce qui m’a incité à vouloir lire ce livre. Je suis persuadée que 95% de l’acte d’achat d’un livre en librairies ou sur les réseaux sociaux dépend de sa couverture. D’autant plus, que ce rose est sacrément tendance…

Enfin, j’ai trouvé cette lecture très originale et différente des autobiographies plus classiques que j’ai l’habitude de lire. Géraldine Dormoy fait des aller retours dans le temps entre les chapitres. Elle alterne le temps du récit comme elle l’a vécu avec le temps de l’écriture et la manière dont ses proches reçoivent son récit.

Mes recommandations de lectures si vous aimez les autobiographies :

-Devenir de Michelle Obama

– La tolérance ne sauve pas, l’amour oui : l’autobiographie de Frédérique Bedos

-Vers la liberté de Mahtob Mahmoody

On va éviter de vous recommander l‘autobiographie du prince Harry, Le suppléant, dont le déballage totalement idiot bête sera difficile à oublier…

Biographies et autobiographies·Littérature

Une reine, être femme dans le mellah de Casablanca des années 1930

En novembre, la famille de Gad Elmaleh était à l’honneur avec la sortie du film Reste un peu. C’est un film très autobiographique où l’humoriste a invité ses parents et sa sœur à jouer leur propre rôle. Il raconte l’expérience spirituelle qu’il est en train de vivre et comment il a osé entrer dans une église catholique avec sa sœur Judith quand il était âgé de sept ou huit ans à Casablanca…

Elle travaille dans l’ombre de ses frères Arié et Gad qui sont tous les deux comédiens. Elle participe à l’écriture de ses sketchs et scénarise également. Le sujet de son premier roman m’a vraiment intéressée et m’a permis de mieux la connaître à travers les émissions de télé et les articles de presse.

C’est d’ailleurs, l’article de Paris Match qui m’a vraiment donné envie de lire ce roman. On les a photographié unis, en famille, dans la cuisine des parents. L’article titre : « Il n’y a plus de secrets chez les Elmaleh » et reproduit un portrait de Simha pour raconter son histoire.

Judith sous les traits d’Anna, son double littéraire, se réfugie quelques jours chez sa grand-mère à Casablanca car elle divorce à nouveau. Avec beaucoup de tact et de douceur, elle va aider sa grand-mère Simha surnommée Mimi et jamais Mamie à lui raconter sa vie. J’ai aimé ce roman car il m’a rappelé mes conversations avec ma grand-mère Annette.

Elle m’a transmis son optimisme et sa joie de vivre : relativiser et profiter de ce qui est bon et joyeux quand on saute dans le fossé avec son petit vélo pour se protéger d’un bombardement ennemi dans les années 1940 dans le Pas de Calais.

Ce livre parlera à tous ceux qui ont été enrichis par la transmission de souvenirs et d’expériences personnelles avec leurs ascendants. J’ai eu cette chance avec ma grand-mère et mon arrière tante Julienne, qui ont pris les routes de l’exode ensemble alors que Julienne était enceinte de son premier enfant (pour accoucher sereinement, on a connu mieux).

Simha était une toute jeune fille de quatorze ans dans le mellah de Casablanca dans les années 1930. Sa famille était très pauvre et vivait dans une vraie promiscuité. Pour améliorer le quotidien et fournir des enfants à sa tante stérile et son mari, on lui a organisé son propre mariage sans qu’elle ne comprenne rien.

Dans les premiers chapitres du roman, la narration est confiée à Simha pour se livrer en employant la première personne. Le talent de Judith Elmaleh est d’avoir su retranscrire avec précision et authenticité tous les non-dits, les regards lourds de sens quand on la prépare pour son mariage. C’est une gamine qui ne comprend rien à ce qu’il se passe, elle se demande pourquoi on lui accorde autant d’importance en l’emmenant au hammam pour la préparer comme une reine.

Et ensuite, une fois mariée, on nie carrément son intégrité, son consentement en l’envoyant dans le lit d’un homme bien plus âgé qu’elle : vingt-cinq ans d’écart. Heureusement, elle est tombée sur un homme bon et attentionné qui va aimer deux femmes à sa manière. La situation de Simha aura pu être vraiment catastrophique car comme elle était jolie et très pauvre, le proxénète du quartier commençait à roder dans le quartier.

La bigamie est un sujet sulfureux qui fait glousser sous cape. Mais dans ce roman, il met en lumière les rivalités entre femmes en sourdine, mais bien réelles. Cela devait être acrobatique ces sept enfants brinquebalés entre deux mamans et deux maisons car bien sûr dès que Simha mettait au monde un enfant, on l’envoyait vivre avec la première épouse. Le récit de son premier accouchement quand le couple attend derrière la porte le bébé est déchirant.

En tant que maman, j’ai eu le cœur serré pour cette toute jeune fille qu’on a propulsé dans le monde des adultes sans pouvoir grandir à son rythme. Le vrai sujet du livre, ce n’est pas la bigamie, c’est la construction personnelle pour devenir une femme face au poids de la tradition. Forcément, l’histoire d’Abraham qui prend pour maîtresse sa servante Agar pour avoir une descendance fait écho ici.

Judith Elmaleh fait aussi référence à une autre histoire vraie beaucoup plus contemporaine. Celle de Lady Diana et c’est assez dingue. Comme Simha, Diana a été choisie pour sa jeunesse, sa virginité et sa généalogie pour donner un héritier au futur roi d’Angleterre qui en aimait une autre : Camilla Parker Bowles. Encore une fois, la tradition a été la plus forte. Pour Diana, le traumatisme a été dévastateur car elle mangeait de manière compulsive pour noyer son chagrin.

La grand-mère de Judith, Simha est parvenue à trouver sa place dans cette situation familiale sacrément cocasse. Mais on réalise que dans les échanges avec sa petite fille, elle porte en elle le poids de l’amertume d’avoir été utilisée. La scène où elle regarde un chanteur à la télévision avec l’enthousiasme d’une midinette est touchante, on dirait qu’elle retombe dans l’enfance dont on l’a privée.

L’unité de cette grande famille juive marocaine de sept enfants est assez extraordinaire. C’est l’un des oncles de Judith qui lui confie certains aspects de ce secret de famille pour s’en délester car son père n’ose pas lui en parler vraiment.

Judith Elmaleh décrit avec beaucoup d’affection cette famille que l’on connait de mieux en mieux grâce à Paris Match (ma lecture hebdomadaire favorite).

Le rire est aussi une religion chez eux, il faut être drôle et se répéter pour bien raconter une blague. C’est leur fameux grand père Eliahou qui a transmis cette obligation. Il a bien fait puisque tous les membres de cette famille sont talentueux. Le jeu d’acteurs des parents de Gad Elmaleh dans Reste un peu est assez exceptionnel. J’aime aussi beaucoup Arié Elmaleh dans la plupart des rôles comiques qu’il interprète.

Enfin, ce livre m’a donné envie d’aller visiter Casablanca, cette ville mythique au bord de l’Atlantique. Judith Elmaleh a su écrire un roman sensoriel et tactile qui capte avec excellente l’atmosphère d’un quartier emblématique, le choc entre les cultures françaises et marocaines…

Je remercie les éditions Robert Laffont pour l’envoi de ce beau roman en service de presse. La couverture de ce premier roman est très efficace. Elle donne envie d’aller visiter le Maroc et de mieux comprendre la culture juive du Maghreb par un saut au musée d’art et d’histoire du judaïsme dans le Marais à Paris.

Retrouvez ici d’autres articles consacrés à d’autres personnalités enrichies par la culture juive :

René Goscinny, génie de la BD

-Helena Rubinstein, un empire industriel à la force du poignet

-Adèle Bloch Bauer, muse de Gustav Klimt pour l’éternité.

Biographies et autobiographies

Stromae, retour en 10 coups d’éclats marquants

Je me réjouis du retour sur le devant de la scène de Stromae. Il réussit la prouesse de faire l’unanimité auprès de faire l’unanimité auprès de chaque génération de ma famille : mes parents, mon frère et mon mari…. Une prouesse car nous avons des goûts musicaux très différents.

Son immense popularité vient du fait que Stromae n’est pas seulement un chanteur. Il est aussi un formidable danseur, un parolier hors pair et indéniablement un youtubeur qui sait capter au détail près la société actuelle pour la faire réagir.

Il se sert de la mode et même de ses cheveux pour bousculer les codes sociaux établis.

A travers cet article fort difficile à écrire, j’ai voulu exprimer en quoi l’œuvre de Stromae marque collectivement les décennies 2010-2020. Peu d’artistes parviennent à ce tour de force, tentons d’analyser en quoi sa musique est un véritable phénomène de société.

Des textes graves et profonds associés à une musique festive : Alors on danse, 2010

La force de Stromae est d’être authentique et drôle. Ses leçons de musique électro avec son synthétiseur portatif sont vraiment sympas à suivre car il y’a toute une mise en scène.

Stromae est un véritable personnage de BD, il sait jouer à la perfection le grand beta avec les Diables rouges dans Ta fête comme le dictateur bien méchant qui me fait peur, le gros macho ou la jeune femme vulnérable qui se déchirent…

Comme Angèle actuellement, Stromae est l’ambassadeur de la Belgique dans le monde entier, il impressionne les chanteurs américains comme Black Eyed Peas ou Chris Martin. Il assume son accent flamand dans son interprétation.

Son physique grand et sec, son phrasé, sa présence scénique par de grands gestes, sont autant de comparaisons avec Jacques Brel.

C’est facile comme comparaison mais ça me parait évident quand je regarde une vidéo Youtube de son concert à Montréal. Surtout que Jacques Brel chantait aussi des chansons pas toujours bien joyeuses mais qui racontaient la société des années 1950.

Le tournant de la carrière de Stromae c’est indéniablement Papaoutai en 2013. Sa chanson la plus personnelle mais dans laquelle bon nombre d’enfants peuvent s’identifier. Stromae a confié s’être inspiré de relation avec son propre père qui avait la mauvaise manie d’être un coureur alors qu’il avait une famille.

Comme Céline Dion, Stromae a cette capacité d’être totalement ouvert pour évoquer sa vie avec son public. Ainsi, il parle ouvertement de son père et le deuil qu’il a du vivre quand son père est mort à ses treize ans lors du génocide rwandais.

L’humour noir et méchant dont a fait preuve Charlie Hebdo en détournant sa chanson Papaoutai pour composer une couverture de bien mauvais goût m’indigne particulièrement.

Les références à la mode vestimentaire des sapeurs en Afrique

© Getty Images / Tony Barson

Stromae se sert aussi de sa double culture : européenne et africaine dans son travail. Il conjugue musique electro et élégance des sapeurs congolais. Il est grand et s’habille de manière colorée et élégante. Ses polos aux motifs géométriques ont même été commercialisés par son label Mosaert avec un défilé au Bon marché en 2018. Je suis fan du look décalé polos inspirés par l’Art nouveau belge associés aux chaussettes claquettes.

Tous les mêmes , Le grand journal, 2013

Cette performance d’acteur et de danseur je la regarde souvent tant je la trouve géniale. Elle montre bien le talent millimétré de ce génie qui est un fin observateur des rapports hommes/femmes. Il sait jouer à la perfection de son androgynie pour interpréter une femme bafouée et l’instant suivant un bon gros macho qui se met les doigts dans le nez (dans le clip hein, pas dans l’émission).

Ses choristes, tous des hommes en nœud papillon et chapeau melon, le lancent dans une superbe carioca qui se passe de mots car tout est dit dans le premier couplet :

« Cette fois c’était la dernière
Tu peux croire que c’est qu’une crise
Mate une dernière fois mon derrière
Il est à côté de mes valises
Tu diras au revoir à ta mère, elle qui t’idéalise
Tu n’vois même pas tout c’que tu perds
« 

Santé, 2021

A la première écoute, j’ai trouvé les paroles de cette chanson pleines de bons et nobles sentiments mais je n’étais pas convaincue. Puis, j’ai vu le clip et j’ai réalisé que la réussite d’un morceau de Stromae, c’est un tout.

Il y a une chorégraphie très savante qui fait corps avec la musique , c’est une ronde entrainante avec une trentaine d’hommes et de femmes. On dirait des marins ou un corps professionnel laborieux comme ceux décrits dans la chanson Santé.

Les choristes de Stromae sont vêtus comme lui, d’une sorte de chemisier immaculé, dessiné par sa femme, Coralie Barbier, styliste. Depuis Papaoutai, c’est Marion Motin qui signe la plupart de ses chorégraphies. On se croirait à la grande époque du Grand journal. Chapeau bas l’artiste !

L’enfer , journal de 20 heures de TF1 de Anne-Claire Coudray, 2022

Cette performance à la fin du journal de 20 heures a crée un buzz sans précédent qu’il est intéressant d’analyser. Cette prestation m’a laissée perplexe, je suis admirative du courage de se livrer autant quand on connait la période de désert par laquelle le chanteur est passé mais j’ai trouvé la mise en scène sinistre et dérangeante.

Cette fois-ci, la sobriété était de mise car Stromae portait un costume cravate très classique, comme un homme politique… Et je pense que ce n’était pas anodin.

Les réactions des journalistes étaient vraiment passionnantes à lire. Stromae a ainsi révolutionné l’exercice de la promotion médiatique tout en libérant la parole sur la santé mentale.

Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir que Stromae a fait appel aux choristes traditionnelles bulgares d’Orenda pour illustrer le chaos dans la tête d’une personne totalement en proie à des pensées suicidiaires.

Ce gars-là est sacrément talentueux pour associer les musiques du monde entier. Il le doit à sa mère, une globe-trotter qui emmenait ses enfants, hors des sentiers battus, dans des autobus déglingués sur les routes du monde entier pour découvrir des paysages, des sonorités différentes.

Il réussit la prouesse d’élargir notre culture musicale au service de la chanson française. Grâce à Stromae, j’ai découvert l‘ehru, une vièle chinoise employée dans le morceau Santé.

Il y a d’ailleurs un musée à Bruxelles que j’ai très envie de visiter : le superbe musée Art nouveau dédié aux instruments de musiques.

Prochainement dans ce blog, j’ai bien envie de créer une rubrique dédiée chanson française pour me souvenir avec vous des chansons qui ont marqué ma vie personnellement : celles de Bénabar, Jean-Jacques Goldman depuis que j’ai vu le film Envole-moi.

Et vous, quelle est votre chanson préférée de Stromae ?

Retrouvez ici mes articles qui traitent de la vie d’artiste des chanteurs que j’aime :

Demain, j’irai mieux, la musique inspirée d’Andrée Grise

Aline, les coulisses de la vie d’artiste

-Sister soul, comment Aretha Franklin a démocratisé la musique gospel

Biographies et autobiographies

Deux Américaines à l’honneur cet hiver à Panthéon-Luxembourg

Emily a beau monopoliser les colonnes Morris du quartier pour annoncer qu’elle revient à Paris dans une saison 2 sur Netflix, je ne vais pas vous parler d’elle mais bien de Joséphine Baker et Vivian Maier.

Ce sont deux Américaines qui ont marqué la France par leurs talents artistiques et leur personnalité, elles ont vécu un attachement particulier avec notre pays.

Comme les expositions qui leur étaient consacrées sont temporaires ou coûtent un rein (14€50 pour visiter l’exposition Vivian Maier au musée du Luxembourg, ce n’est acceptable, messieurs les sénateurs, faites quelque chose), j’ai choisi de lire leurs biographies.

Elles ont rapidement rejoint ma bibliothèque, non loin de Sister soul, la biographie géniale d’Aretha Franklin écrite par Jean-Luc Gadreau.

Une femme en contre-jour, Gaëlle Josse, Editions Noir sur blanc, 2019, 14€

Ce roman biographique, je l’ai lu pendant les vacances de Noël. Il a beau être court à lire : 160 pages, il est très dense tant le portrait psychologique de cette femme seule est précis et passionnant.

Le titre est très bien choisi. Il raconte l’histoire hors norme d’une femme née en 1926 à New-York dans une famille dysfonctionnelle à son comble.

La grand-mère française Eugénie, abandonne sa fille Maria à sa sœur en Haute-Savoie pour faire fortune en Amérique. La jeune fille rejoint cette mère totalement inconnue et vit une vie totalement instable, livrée à elle-même.

Elle rencontre alors Charles Maier, qu’on peut tout à fait qualifier de très mauvais bougre. Il terrorise les femmes qu’il épouse à tour de rôle et n’assume aucunes responsabilités paternelle.

Vivian Maier en héritera de profonds troubles psychologiques que les familles qui l’emploieront comme nurse constateront à un moment ou à un autre de ses années chez eux. Certains la prenaient en grippe, d’autres s’attachaient à elle. Comme ses trois petits protégés de Chicago qui lui fourniront un toit dans ses dernières années qu’elle vécu dans un grand dénuement.

Ce sont eux qui feront cette découverte de milliers de clichés exceptionnels.

Vivian Maier, sans titre, 3 septembre 1954 
(Vivian Maier / Maloof Collection, Courtesy Howard Greenberg Gallery, New York

Vivian Maier se distingue beaucoup de la tendre nostalgie d’un Robert Doisneau avec ces écoliers parisiens rêveurs (je cite Gaëlle Josse dans son livre) . Elle montre la crasse des trottoirs new-yorkais, la pauvreté des quartiers peu recommandables où elle aimait s’aventurer avec les enfants qu’elle gardait. C’est vraiment l’envers du décor du rêve américain et cela passionne les gens !

Droits réservés Ginacie

Vivian Maier fut l’une des plus grandes photographes américaines du 20eme siècle. Mais aucune exposition de son vivant ne révéla l’étendue de son talent. Décédée en 2009, cette exposition au musée du Luxembourg est l’une des premières d’envergure mondiale dédiée à l’artiste.

Cette lecture m’a été recommandée par ma collègue Ana (si tu passes une tête par ici, merci beaucoup !). J’aime beaucoup la plume de Gaëlle Josse qui a su mettre des mots sur les maux de Vivian, elle parle de santé mentale et de violences intra-familiales avec beaucoup de pudeur et de retenue.

Alors que c’est vraiment la famille Groseille dans l’Amérique des années 1930.

Enfin, magie d’Internet, j’ai découvert le blog de la brodeuse Ginacie, une mine d’or qui m’inspire beaucoup en ce moment. Vivian Maier est l’une de ses références artistiques.

Collage de Carole B

Joséphine Baker par Jacques Plessis, Folio Gallimard, 8€60

Cette biographie de qualité n’a pas de titre, c’est dommage alors que La croix magazine a été plus inspiré : La renaissance d’un phénix. J’ai véritable découvert son histoire grâce à un chef d’œuvre : Culottées de Pénélope Bagieu, roman graphique et dessin animé génialissime.

Je connaissais ses chansons grâce à ma grand-mère et mon arrière-tante nées en 1919 et en 1937 mais pas son passé de résistante et de militante anti-raciste.

Cette femme est tout simplement unique en son genre. Comme Vivian Maier, elle a grandi dans une famille dysfonctionnelle avec de vrais malheurs très jeune. Mais avec sa joie de vivre en étendard, elle a su tirer son épingle du jeu grâce à son don pour la danse et la comédie. Dans une Europe franchement raciste, elle a réussit le tour de force de se faire aimer et respecter. Quelle schizophrénie à l’heure actuelle de la cancelled culture et du wokisme de célébrer Joséphine Baker au Panthéon le 30 novembre 2021.

Oui lors de l’exposition universelle de 1931, la France coloniale montrait des zoos humains porte de Vincennes. Mais la France a aussi accueilli Joséphine Baker les bras ouverts, subjuguée par ses pitreries et surtout son don pour danser le charleston comme personne. Elle a bâti une véritable fortune lui permettant d’acquérir un château comme celui de la Belle au bois dormant en Dordogne.

Elle a su jouer de son exotisme, de son originalité pour attirer les foules à ses spectacles, devenant la muse des peintres d’avant-gardes. Ses contemporains n’étaient pas bien finauds à la considérer comme une sauvage mais ils avaient une véritable curiosité, une forme de respect pour ces danseurs, ses musiciens noirs.

Droits réservés C215

Ma grand-mère Annette, était une enfant de la seconde guerre mondiale qui a grandi avec la radio. Elle vouait une admiration sans borne à tous ces musiciens de jazz : Louis Amstrong, Sidney Bechet….Je me souviens d’une excellente conférence au Petit palais sur le tourisme international à Paris.

Les universitaires présents expliquaient que malgré la guerre d’Algérie et son lot d’injustices, les Afro-américains se sentaient plus en sécurité à Paris que dans leur pays dans les années 1960.

La manière dont Joséphine Baker s’est attachée à la France est admirable. Je peux vous dire qu’il y avait une atmosphère de joie dans les rues et dans les commerces autour du Panthéon le 30 novembre dernier. Joséphine Baker avait beau être décédée depuis plus de quarante ans, cette cérémonie avait du sens ! Célébrer une résistante en 2021 est important.

Plus que symbolique, cet hommage à une femme de caractère me console à l’idée que mon pays La France est encore capable d’être une terre d’accueil à laquelle on a envie de s’attacher.

L’époque de Joséphine Baker n’était pas bien plus glorieuse que l’époque actuelle avec la montée du nazisme, la ségrégation aux Etats-Unis mais elle n’a jamais baissé les bras. Même acculée par les dettes et chassée comme une malpropre de son château alors qu’elle a permit le rayonnement de toute une région.

Il y a pléthore de livres consacrés à cette personnalité incontournable (elle a été invitée au couronnement d’Elisabeth II en 1953, le pape l’a encouragé dans son projet de créer une famille arc-en-ciel). Cette femme a vécu mille vies, toutes aussi déroutantes les unes que les autres.

J’ai choisi cette biographie la plus classique, de manière volontaire car j’aime beaucoup cette collection Folio biographies. J’avais beaucoup aimé lire celle consacrée à Klimt. L’auteur raconte une femme aussi courageuse que déraisonnable.

Il explique les gloires de sa vie publique incomparable mais aussi les affres de ses blessures personnelles : la stérilité, l’état de santé en dents de scie où la grande faucheuse a essayé de faire perdre les armes à une femme d’une vitalité incomparable, les dettes et les multiples divorces…

Retrouvez ici d’autres biographies de personnalités célèbres aux trajectoires qui font réfléchir !

La petite fille à la balançoire : la tolérance ne sauve pas, l’amour oui

-Profession prêtre

-L’amour de Dieu plus fort que le napalm

Biographies et autobiographies·Cinéma

Aline, les coulisses de la vie d’artiste

Ce film, j’attendais sa sortie depuis un an. C’est bien simple, je suis fan absolue de Valérie Lemercier parce qu’elle est marrante tout simplement. En cette période de pandémie à rallonge, Aline est un film qui fait beaucoup de bien. Je vous explique pourquoi dans cet article.

Le film

C’est un biopic librement inspiré de la vie de Céline Dion, la plus grande chanteuse au monde, trésor national au Québec. L’histoire commence en 1932 avec le père de Céline. Il a un affreux papa qui lui rackette son argent de poche pour aller boire jusqu’à plus soif. Il va faire de son malheur une force puisqu’il va créer une famille nombreuse de musiciens avec sa femme dotée d’un sacrée caractère.

Ce film est un hommage à une famille nombreuse et unie qui va voir éclore un joyau brut de 14 ans : une voix incroyablement mature. A force de travail sur son look, sa diction en anglais et surtout sur sa dentition, elle va rapidement connaître une ascension phénoménale accompagnée par un manager de génie : le fameux René Angélil.

Valérie Lemercier raconte comment ce fameux trio artistique, composé de la maman, du manager devenu l’époux et de la chanteuse à la voix d’or vont conquérir le monde : la France avec notre Michel Drucker national, le Japon, les Etats-Unis, la Suisse à l’occasion de l’Eurovision.

Céline Dion est une diva dans les années 1990 avec Mariah Carey et Whitney Houston. Mais elle a cette force de vivre sainement cette célébrité en travaillant d’arrache pied et en restant la même grâce à son solide socle familial.

Même quand les Angélil font fortune dans leur grande villa de Las Vegas façon Mélania et Donald Trump, lui au golf et elle avec ses tonnes de chaussures, ils restent sympathiques. On se réjouit de leur opulence car ils ont bossé ensemble et ont bien mérité leur réussite.

Comme l’a déclaré Valérie, ce film raconte les coulisses de la vie d’artiste pas toujours aussi glamour que l’on ne croit. Comme l’humoriste, Céline connaît la solitude de manger un plat réchauffé dans sa loge ou de devoir donner le meilleur de soi même quand on est triste ou en petite forme.

J’ai beaucoup aimé ce film car il raconte la normalité d’une star planétaire. Céline Dion, je la trouve parfois exaspérante en interviews quand elle surjoue avec ses yeux et ses postures à la limite du grotesque. Elle est clown c’est vrai et ce film la rend extrêmement sympathique.

C’est un biopic hagiographique à fond, un parti-pris totalement assumé par sa réalisatrice. Valérie Lemercier critique les journalistes québécois qui ont glosé sur ses difficultés à procréer. C’est vraiment immonde et je ne suis pas bien fière de moi d’avoir rigolé bêtement aux blagues douteuses de Laurent Gerra sur le couple Dion/Angélil sur les ondes de Rire et chansons.

Copyright RECTANGLE PRODUCTIONS/GAUMONT/TF1 FILMS PRODUCTION, DE L’HUILE/ PRODUCTIONS CARAMEL FILM INC./PCF ALINE LE FILM INC./BELGA PRODUCTIONS

La fin du film raconte la difficulté du deuil quand on perd l’amour de sa vie quelque soit son âge. L’actualité rattrape alors le tournage de ce film car cette année Céline Dion a dû interrompre ses spectacles pour épuisement physique.

La vie d’artiste est rude, elle demande de nombreux sacrifices. Ce film met en lumière tout le talent de Réné Angelil qui a su produire des spectacles rentables tout en permettant une vie familiale la plus normale possible. En chantant à résidence à Vegas, Céline pouvait retrouver ses enfants tous les soirs.

Voici un extrait de Vivement dimanche, où René, l’homme de l’ombre a droit à une belle ovation du public (à la fin de l’extrait). Valérie Lemercier s’est focalisée sur cette belle histoire d’amour. Moi j’aurai aimé qu’elle raconte l’histoire de ses chansons avec Jean-Jacques Goldman, avec Garou

J’aime passionnément les biopics de musiciens : Ray, Walk the Line, Cloclo (même si Claude François est monstrueux de narcissisme) parce que leurs chansons ont marqué une époque, elles témoignent de tournants dans leurs carrières et résonnent dans nos vies personnelles.

Noël 1996, j’ai huit ans. Au pied du sapin, m’attend le cd de Céline Dion, D’eux. Je ne connais pas l’artiste, j’ai demandé ce cadeau au Père Noël pour faire comme tout de monde à l’école.

Pourtant, ce CD va tourner en boucle tout au long des second et troisième trimestres de l’année de CE2 dans mon salon, au rythme de mes chorégraphies navrantes mais effrénées (la brosse à brushing pour micro, je le confesse).

L’album D’eux m’a marquée pour la spiritualité et l’émotion qu’il dégage. Je pense que je ne suis pas la seule puisqu’il s’en est vendu plus de dix millions d’exemplaires. C’est l’album francophone le plus vendu au monde à ce jour. J’ai été très sensible quand j’étais petite à toutes les références juives et chrétiennes de cet album : « ma prière païenne », « la mémoire d’Abraham « , « les derniers sont les premiers « .

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La chanson très émouvante Vole est dédiée à sa nièce qui souffre de la mucoviscidose à l’époque. Avec le recul, je ne suis plus très convaincue par son plus gros tube Pour que tu m’aimes encore car déclarer : « Je te jetterai des sorts pour que tu m’aimes encore« , bonjour la relation toxique ! .

Plus tard, je n’ai plus trop suivi la carrière de Céline tant cet album signé Jean-Jacques Golmann est aux antipodes de ses succès plus commerciaux par la suite : I’m alive, My heart will go on. Avec Titanic, Céline sort l’artillerie lourde. Elle devient une véritable show-woman comme Beyoncé aujourd’hui avec extensions et robes à paillettes. Elle remplit les plus grands stades du monde entier .

Elle est même une star malgré elle dans la comédie Sur la piste du Marsupilami avec cette imitation grotesque de Lambert Wilson qui fonctionne pourtant à merveille.

Pour conclure, on peut dire que ce film que j’attendais tant, était à la hauteur de mes attentes. Je sais que j’ai une collection d’amies qui l’ont vu et qui ont beaucoup aimé. J’y suis allée avec ma chère pote Alix, mon ancienne collègue de l’Ecole du Louvre, spécialiste de chorégraphies grotesques de Claude François à la pause déjeuner.

J’étais sûre que le film lui plairait !.

Nous avons vu le film au cinéma Le Méliès à Montreuil, une adresse imbattable que je vous recommande. Le billet d’entrée plein tarif est de 6€, une belle initiative municipale depuis de nombreuses années. Ce chouette cinéma avec son décor de météorite dans le hall d’entrée rend hommage à un grand pionnier du cinéma français qui avait ses studios à Montreuil. C’est une adresse idéale pour une dernière sortie en famille le dimanche soir avec un café/restaurant très agréable à fréquenter.

Et vous quelles sont vos chansons de Céline Dion favorites?

J’ai eu des frissons d’entendre la chanson D’amour ou d’amitié, une des premières chansons de Céline à ses tous débuts.

Cela fleure bon la nostalgie des années 1980, mon enfance, qui commence à ressembler à l’époque des dinosaures, il faut bien se l’avouer quand je discute avec tous ces millénials à la pause déjeuner au bureau.